Mardi 21 juillet 2020, Xavier Batut a interrogé le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, sur l’avenir de la filière du lin en France. Vidéo.
.@XavierBatut (LaREM) s’inquiète des conséquences de l’arrêt des exportations de lin vers la Chine – du fait de la crise sanitaire – sur l’ensemble de la filière en France, leader mondial. Il demande au Gvt un plan d’action et de soutien au secteur. #QAG #DirectAN pic.twitter.com/fCKhEugUi5
— Assemblée nationale (@AssembleeNat) July 21, 2020
A la séance des questions d’actualité au Gouvernement du mardi 21 juillet 2020, j’ai interrogé Julien Denormandie, le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, sur l’avenir de la filière du lin en France.
En effet, en cette période où la campagne d’arrachage du lin a débuté, en Normandie et en Picardie, des inquiétudes sur l’avenir de cette filière se font ressentir sur nos territoires. Dans un contexte inédit de crise sanitaire, la Chine qui est le premier importateur de lin – quelque 80 % de la production de nos régions – a mis ses usines à l’arrêt depuis le début de l’épidémie. Les annulations de commandes s’enchaînent et les ventes sont quasi-nulles.
Un marché dynamique et rémunérateur
En 10 ans, la surface de lin cultivée a doublé en Normandie qui, à elle seule, assure 60 % de la production mondiale, suivie par les Hauts-de-France. Au-delà des volumes, la qualité de cette matière première permettait aux agriculteurs de se positionner sur un marché très dynamique et rémunérateur. Aujourd’hui, un affaissement des prix est craint, il aurait un fort impact sur toute la filière. Nos 4 000 producteurs ont chez eux une grande partie de leur stock de l’année 2019 et ils vont manquer de place pour mettre à l’abri la récolte 2020.
Cet état de fait provoque un effet boule de neige sur les entreprises de teillage, ces usines qui extraient la fibre du lin, qui sont bien présentes sur nos territoires avec plus d’un millier d’emplois directs, ou encore sur les entreprises de tissage.
Depuis la mi-mai, avec plusieurs de mes collègues députés, nous sommes en contact régulier avec les organisations professionnelles, mais aussi avec l’ensemble des acteurs économiques de la filière lin implanté dans nos circonscriptions respectives. Tous ont bien conscience que le lin est sur-dépendant de la Chine. Le glissement d’une crise conjoncturelle vers une crise structurelle n’est pas à exclure dans ce contexte d’économie mondialisée. Les débouchés actuellement pour le lin se répartissent comme suit : 90 % à destination textile (mode et maison) et 10 % à destination technique (composite haute performance).
De nouveaux débouchés
Les entreprises normandes et picardes qui cultivent et transforment le lin ont un savoir-faire remarquable, parfois unique, et elles n’hésitent pas dans la mesure de leurs moyens à innover pour trouver de nouveaux débouchés avec cette fibre naturelle : recherches et développement, investissements dans la robotique, mise en place d’une Indication géographiquement protégée transnationale… Si les mesures d’aides d’urgence ont été appréciées pendant la crise sanitaire, nos interlocuteurs aimeraient des ajustements et surtout un véritable accompagnement de l’Etat pour les aider à communiquer, relocaliser et développer une filière française innovante de lin.
La fibre de lin a acquis sa notoriété pour l’industrie textile, mais elle présente aussi des caractéristiques qui permettent d’en faire des produits biosourcés. Ces derniers méritaient d’être davantage valorisés ; ils présentent une alternative écologiquement exemplaire à la fibre de carbone ou de verre utilisée, par exemple, dans l’industrie aéronautique, automobile, l’armement ou encore les éoliennes.
En adéquation avec les déclarations du président de la République qui, dimanche 14 juin au soir, a indiqué vouloir « reconstruire une économie forte, écologique, souveraine et solidaire » et dans le cadre du plan de relance post-crise sanitaire, il nous apparait important que l’Etat accompagne cette filière.
Une culture qui n’est pas délocalisable
La culture du lin qui, dans nos régions, n’est pas délocalisable. En effet, le climat normand lui est bénéfique et elle présente l’avantage de ne consommer qu’une part très marginale d’intrants et de ne produire aucun déchet ; tous les éléments de la plante sont valorisés. Si la culture du lin venait à se réduire considérablement, il est fort à parier que les agriculteurs se tourneraient vers d’autres productions (pommes de terre, maïs, blé…) favorisant ainsi des problèmes d’érosion ou encore de préservation agro-écologique des sols.
Plusieurs problématiques se posent pour l’ensemble des maillons de la filière.
A court terme (mesures urgents)
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Accompagnement des premiers acteurs de la filière lin pour le stockage et l’engrangement de la paille de lin et/ou la filasse. M. le Préfet de région et ses services pourraient identifier les besoins de stockage pour ces trois prochaines années et les solutions existantes sur le territoire.
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Compte tenu de la particularité du marché du lin et pour faire face aux enjeux de trésorerie, il faut étendre le PGE, le prêt garanti par l’Etat, prévu initialement sur une durée d’un an à trois ans. Avec le remboursement de la première traite à 36 mois. Les services de M. le Ministre de l’Economie et des Finances doivent se saisir du sujet.
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Afin de relancer la consommation grand public, nous devons accompagner la CELC, la Confédération européenne du lin et du chanvre, pour la mise en place d’actions de communication grand public visant à promouvoir cette matière éco-responsable par excellence.
A moyen terme (Plan de relance et de relocalisation)
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La filière lin doit être accompagnée financièrement dans ses démarches d’innovation, dans les domaines de la recherche et le développement.
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La création d’un cluster économique qui permettrait ainsi de structurer la filière.
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La relocalisation et création de filatures (fil textile et technique) en France pour ne plus dépendre du monopole asiatique. De ce fait, les produits seraient valorisés « Made in France » et l’ensemble de la filière travaillerait en tenant compte des règles sociales et écologiques.
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Les secteurs de l’automobile, de l’aéronautique, des énergies renouvelables… bénéficient, dans le cadre de cette crise, d’un certain nombre de mesures d’accompagnement par l’Etat. Ce dernier étant aussi donneur d’ordre, il faut prendre en compte que le lin à destination technique présente de meilleurs atouts que la fibre de carbone ou de verre.
Ma question d’actualité au Gouvernement consistait à savoir comment allait être intégrée la filière du lin dans le cadre du plan de relance post crise Covid-19.
Le ministre m’a répondu notamment :
Nous devons pousser la promotion, les stockages, malgré les difficultés. Nous devons également inclure la filière du lin dans le plan de relance, au même titre que les autres filières agricoles. Je prends, devant vous, l’engagement d’aider cette filière, au niveau de Bruxelles comme au niveau national.