Question
Question publiée au JO le : 04/10/2022
M. Xavier Batut attire l’attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur l’interdiction d’épandage des boues urbaines instaurées à la suite de la crise du covid-19. L’interdiction d’épandage de boues non-hygiénisées a été prise par arrêté le 30 avril 2020, sur la base des recommandations de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et par principe de précaution, dans son avis du 27 mars 2020. Prise sur le principe de précaution afin d’endiguer la progression de l’épidémie de covid-19, au plus fort de la crise, cette décision pèse désormais lourdement sur les collectivités, notamment en milieu rural. Elle induit un coût 3 à 5 fois plus important que l’épandage agricole direct, d’autant plus impactant que les subventions à l’hygiénisation, notamment en Seine-Maritime, ont pris fin au 31 décembre 2021. Avant la crise sanitaire, la majorité des stations d’épuration urbaines (STEU) valorisaient leurs boues par épandage agricole direct, chaque année ou de façon ponctuelle après curage. Une partie de matières de vidange issues de l’assainissement non collectif faisait également l’objet d’épandage agricole. L’évolution de traitement va inévitablement faire augmenter la facture d’eau des concitoyens, à l’heure d’une inflation sans précédent et d’une explosion du prix d’énergie. Aussi, il lui demande si le Gouvernement entend faire évoluer les règles incombant aux boues non-hygiénisées.
Réponse
Réponse publiée au JO le : 22/11/2022
Les boues urbaines ont vu leurs conditions d’épandage modifiées à la suite de l’épidémie de COVID-19 (traitement complémentaire ou hygiénisation au sens de l’arrêté ministériel du 8 janvier 1998). Compte-tenu de l’évolution favorable de l’épidémie, du manque d’études prouvant le risque infectieux du virus ou des traces de virus présents dans les boues et les eaux usées et de l’impact financier de ces mesures sur le budget assainissement des collectivités, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires a entrepris plusieurs actions. En premier lieu, une étude de parangonnage a été réalisée auprès de 7 pays européens. Cette étude a notamment mis en évidence qu’aucun des pays consultés ne semble avoir pris de mesures spécifiques du fait de l’épidémie. En effet, certains États ont estimé que les traitements requis avant épandage (notamment hygiénisation) et en vigueur avant le début de la pandémie permettaient de prévenir du risque de propagation du virus. Par ailleurs, certains États ont estimé qu’aucune étude scientifique ne prouvait clairement que le COVID-19 se transmettait par la voie fécale-orale et donc via les boues (seules des traces de matériel génétique apparaissent dans l’eau mais celles-ci ne présentent pas de capacité infectieuse). Cette approche n’apparaît pas applicable en France, au regard du principe de précaution inscrit dans la charte de l’environnement annexée à la Constitution française. En parallèle, le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires a lancé un état des lieux concernant la mise en œuvre des mesures réglementaires et des éventuelles difficultés soulevées. Il ressort des premiers retours que l’essentiel des dysfonctionnements constatés au niveau des stations préexistaient à l’épidémie de Covid-19 et n’ont donc pas de lien direct avec cette dernière. Au niveau des stations, le stockage des boues, préalablement à leur traitement ou leur épandage, semble la principale difficulté à laquelle les collectivités doivent faire face. L’envoi des boues vers des plateformes de compostage ou d’autres stations de traitement des eaux usées pour y être traitées ressortent comme les deux voies les plus privilégiées. Les stations d’épuration par lagunage et filtres plantés de roseaux sont particulièrement impactées. Pour le moment, les collectivités concernées ont majoritairement décidé de reporter l’extraction des boues issues de ces installations. Sur la base de ces éléments, le ministère a sollicité l’avis du Haut conseil de la santé publique (HCSP) sur l’opportunité de lever ou assouplir les restrictions actuellement en vigueur concernant l’épandage des boues et, le cas échéant, les conditions de mise en œuvre de ces mesures. Le HCSP vient de rendre son avis fin octobre, et recommande de reconsidérer les traitements complémentaires d’hygiénisation liés au SARS-CoV-2 et de pas maintenir les mesures restrictives d’épandage des boues actuellement en vigueur. L’examen approfondi de ses recommandations est en cours par les ministères chargés de l’environnement, de la santé et de l’agriculture, pour en tirer les conséquences.